La loi PACTE, adoptée le 19 avril 2019 en lecture définitive par l’Assemblée nationale, a allongé la durée du certificat d’utilité de 6 ans à 10 ans. Elle a également prévu que le déposant puisse transformer sa demande de certificat d’utilité en demande de brevet, dans un délai et selon une procédure précisés par voie réglementaire (ces précisions ne sont pas encore connues à ce jour). Le texte doit maintenant être promulgué par le Président de la République et publié au Journal Officiel. Mais qu’est-ce qu’un certificat d’utilité et quelles sont les différences par rapport à un brevet d’invention ?
Le certificat d’utilité français (plus connu à l’international sous la dénomination de modèle d’utilité) est un titre de propriété qui permet de protéger une invention technique tout en simplifiant la procédure d’examen. A ce titre, il ne doit pas être confondu avec les modèles français (qui visent à protéger les caractéristiques esthétiques d’un produit). Le modèle d’utilité (ou certificat d’utilité selon son appellation française) est un titre de propriété qui est actuellement très peu utilisé en France (428 dépôts en 2017) alors qu’il est largement utilisé en Chine (1 687 593 dépôts en 2017) et dans une moindre mesure en Allemagne (13 301 dépôts en 2017), en Russie (10 643 dépôts en 2017) en Ukraine (9 108 dépôts en 2017) ou en Corée du Sud (6 801 dépôts en 2017), pays dans lesquels la durée de protection maximale est d’ores et déjà de 10 ans. Contrairement aux brevets, aux marques et aux dessins et modèles, tous les pays ne disposent pas d’un modèle d’utilité. En outre selon les pays, les durées de protection et les inventions éligibles au titre du modèle d’utilité diffèrent. C’est ainsi par exemple que les procédés de fabrication ou les compositions pharmaceutiques ne sont pas éligibles au titre de modèle d’utilité en Chine alors qu’ils le sont en France. Il n’existe pas non plus de procédure centralisée pour obtenir un modèle d’utilité dans plusieurs pays à la fois (même si certains pays autorisent d’entrer en phase nationale d’une demande internationale PCT par le biais d’un modèle d’utilité).
La première différence entre un certificat d’utilité et un brevet d’invention est donc la durée de protection.
Le certificat d’utilité français sera donc valable pendant 10 ans (avec la nouvelle loi) contre 20 ans pour un brevet, sous réserve bien sûr de payer chaque année les taxes officielles de maintien en vigueur.
La deuxième différence est que le certificat d’utilité n’est pas soumis à un examen au fond lors du dépôt de la demande.
En d’autres termes, aucun rapport de recherche n’est établi pour un certificat d’utilité alors que son établissement est obligatoire pour les brevets d’invention.
Ainsi, la procédure d’obtention d’un certificat d’utilité se rapproche davantage d’une procédure d’enregistrement que d’une procédure d’examen en tant que tel. En revanche, si un titulaire souhaite agir en contrefaçon sur la base d’un certificat d’utilité, il doit requérir auprès de l’INPI l’établissement d’un rapport de recherche complet. En France, les dispositions applicables aux brevets d’invention, s’agissant notamment des critères de brevetabilité, le sont également aux certificats d’utilité. Cela signifie notamment que si une action est initiée sur la base d’un certificat d‘utilité, il faudra pouvoir défendre la nouveauté, l’activité inventive et l’application industrielle de l’objet visé par le certificat d’utilité, sous peine de voir son certificat d’utilité invalidé suite à une éventuelle action reconventionnelle en nullité.
En résumé, un certificat d’utilité est un brevet de durée plus courte et dont l’examen est décalé jusqu’au moment où une action judiciaire doit être initiée.
A noter que dans certains pays (la Chine notamment), les conditions de validité intrinsèque d’un modèle d’utilité sont moins strictes que celles d’un brevet d’invention. Ainsi, en Chine, l’activité inventive requise pour un certificat d’utilité est plus faible que celle requise pour un brevet d’invention. C’est la raison pour laquelle nous parlons de choix gagnant-gagnant lorsque nous préconisons à nos clients d’opter pour un tel titre de propriété en Chine. Le titre est plus facile à obtenir qu’un brevet d’invention (car non soumis à un examen de fond) et plus difficile à invalider par un tiers (car le niveau d’activité inventive exigé est plus faible que celui exigé pour un brevet d’invention). La troisième différence tient au fait qu’actuellement, il est possible de transformer un brevet d’invention en certificat d’utilité, mais que l’inverse n’est pas possible.
Cela étant et comme indiqué précédemment, la nouvelle loi prévoit qu’un certificat d’utilité pourra être transformé en brevet d’invention, même si les règles et délais de cette transformation ne sont pas encore connus.
Il est fort probable que le certificat d’utilité français connaisse dans les mois et années qui viennent une période d’essor, notamment auprès des PME et des startups, du fait des changements introduits par la loi PACTE et qui tiennent non seulement de l’allongement de la durée de protection, mais également du nouveau format d’examen des demandes de brevets français. En effet, il est prévu qu’une demande de brevet français soit dorénavant examinée par l’INPI non seulement au titre de la nouveauté, mais également de l’activité inventive, ce qui risque de rendre la délivrance d’un brevet français plus longue, plus difficile et plus couteuse que jusqu’à présent et pourrait orienter les déposants vers les nouveaux certificats d’utilité français. En tentant de renforcer le brevet français, les nouvelles dispositions auront peut-être pour effet de stimuler l’utilisation du certificat d’utilité au détriment du brevet français, surtout si les passerelles permettant de passer de l’un à l’autre autorisent le développement de nouvelles stratégies innovantes de protection.
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